Les plus vieilles cendres volcaniques fossilisées dans une bentonite de 2,1 milliards d’années 

Dès lors qu’elles s’accumulent dans l’eau, les cendres volcaniques forment des couches argileuses. Ces « bentonites » portent la marque le plus souvent d’environnements sédimentaires marins à basse énergie. Différentes des tufs volcaniques formés par la soudure à chaud de tephra, cendre et autres débris dont l’existence dans l’Archéen est connue, les bentonites les plus anciennes répertoriées jusqu’à présent étaient datées de seulement 1,5 milliard d’années. Cette date vient d’être repoussée à 2,1 milliards d’années suite à une étude réalisée sur les sédiments du bassin de Franceville au Gabon par une équipe internationale(1)

Le Paléoprotérozoique dans l’intervalle de 2,3 à 2 milliards d’années est une période charnière dans l’histoire de la Terre. La planète subissait deux changements radicaux : l’oxygénation de l’atmosphère (Great oxidation event ou GOE) et la prolifération vitale du Lomagundi. Ces deux événements sont parfaitement inscrits dans les sédiments très bien conservés du bassin de Franceville (Gabon).
C’est dans ce contexte que des volcans aériens, crachant leurs cendres à proximité des rivages marins de l’époque, ont provoqué la formation d’un dépôt bentonitique. En effet, les particules vitreuses encore chaudes, réagissent très vite au contact de l’eau où elles se transforment en argile expansibles. La diagenèse d’enfouissement les a transformées ensuite en une variété non-expansible : l’illite. De tels dépôts se reconnaissent par leur caractère monominéral qui tranche avec les sédiments silico-clastiques ordinaires dans lesquels ils s’intercalent. Très différents des tufs volcaniques, ils renseignent efficacement par leur composition chimique sur le type de magmatisme qui les a générés. En outre, la bentonite héberge des cristaux de zircons dont l’âge, ici, est notoirement plus ancien que l’époque du dépôt. Ils témoignent de la source du magmatisme qui vient de la fusion de la vieille croûte archéenne à proximité du bassin.
C’est une équipe internationale qui a effectué le travail de sédimentologie, minéralogie, géochimie et datation des zircons confirmant ainsi l’intérêt unique du « chantier Gabon » pour la connaissance de cette période clé de l’histoire de la Terre.


Reconstitutions paléogéographiques montrant la position du bassin de Francevillien dans le supercontinent de Nuna (Columbia) aue Paléoprotérozoïque: (A) position paléogéographique des cratons sud-américains et africains à env. 2,0 Ga pendant l’assemblage du supercontinent Nuna (Colombie). Su = Supérieur; H = Hearne; R = Rae S = Esclave; KAR = Carélie; K = Kola; RP = Rio de la Plata; KAL = Kalahari; CSF = Congo / São Francisco; BTS = Borborema / Trans-Sahara; PAM = Proto-Amazonie; WA = Afrique de l’Ouest; SA = Sarmatie, VU = Volgo-Uralia); (B) Les cratons Congo-São Francisco, montrant les blocs du Gabon (marqués du rectangle) et d’autres blocs africains dans le craton. SFC = Craton de São Francisco, GB = blocs du Gabon, NE CUB = blocs du Nord-Est Congo-Ouganda, TC: Craton de Tanzanie, KB = bloc de Kasal, AB = bloc d’Angola); (C) Carte tectonique du Gabon montrant les blocs ouest, est du Gabon et la ceinture orogénique de l’Ogooué.

 

http://www.insu.cnrs.fr/node/8736

 

Note(s):

  1. Les laboratoires français impliqués sont l’Institut de chimie des milieux et matériaux de Poitiers (IC2MP, CNRS / Université de Poitiers) et le Laboratoire magmas et volcans (LMV/OPGC, CNRS / UCA / UJM / IRD).
Source(s):

Olabode M. Bankole, Abderrazak El Albani*, Alain Meunier, Florent Pambo, Jean-Louis Paquette, and Andrey Bekker. (In press) Earth’s oldest preserved K-bentonites in the ca. 2.1 Ga Francevillian Basin, Gabon. American Journal of Science, Vol. 318, April, 2018, P. 409–434, DOI 10.2475/04.2018.02.

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