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Origine et composition de la Terre :

La précision obtenue avec les nouveaux spectromètres de masse a permis de montrer que la Terre et les différents groupes de chondrites se distinguaient par de très faibles différences isotopiques. Afin de contraindre l’origine et la composition de notre planète, nous souhaitons mesurer précisément les compositions isotopiques des météorites primitives et différenciées puisque ces deux groupes ont participé à l’accrétion planétaire. De plus, les phases porteuses d’anomalies nucléosynthétiques doivent être caractérisées. Si les phases minérales ne peuvent pas être séparées en quantité suffisante, nous utilisons la technique de lessivages progressifs.

La dernière phase d’accrétion est marquée par l’impact géant formant la Lune. Les anorthosites lunaires sont les plus vieux échantillons identifiés sur la surface de la Lune. Elles seraient formées par flottaison de plagioclase lors de la cristallisation d’un océan magmatique. Alors que leur âge place une limite supérieure à l’âge de l’impact géant, leur composition offre l’opportunité unique de caractériser la composition géochimique du manteau lunaire et donc de remonter à celle de la Terre juvénile.

Les premiers 500 Ma de l’histoire de la Terre restent très largement méconnus puisque les témoins de cette activité sont très rares. L’analyse couplée de plusieurs systèmes isotopiques (146Sm-142Nd, 147Sm-143Nd et 176Lu-176Hf) des roches provenant des plus vieux terrains découverts à la surface de la Terre (ex. Afrique du Sud, Canada, Groenland) permet de comprendre l’évolution des sources mantelliques. Ainsi nous pouvons discuter les fractionnements chimiques qui se sont produits précocement dans l’histoire de la Terre et amener des informations supplémentaires sur les modèles de cristallisation de l’océan magmatique terrestre. La cheminée d’Udachnaya (Craton Sibérien) représente une opportunité unique de comprendre la structure et l’évolution d’un craton puisque nous disposons d’une section verticale complète avec des échantillons représentatifs de la croûte et de la base de la lithosphère. Les résultats de l’étude pétro-géochimique et isotopique des ces échantillons et les âges U-Th-Pb obtenus sur zircons et minéraux accessoires nous donnent accès à la chronologie de la croissance crustale. Ainsi les processus responsables de la formation des cratons (super-plumes vs. subduction) peuvent être discutés.

A partir d’environ 4 Ga, la Terre a différencié une croûte continentale stable. Celle-ci possède une composition tonalitique, trondhjémitique et granodioritique (TTG), très différente de celle de la croute continentale moderne. Cette croûte archéenne résulte de la fusion en profondeur de basaltes hydratés transformés en amphibolites à grenat ou en éclogite. Ceci implique que les mécanismes géodynamiques et/ou les sources de ces magmas étaient différents de ce qu’ils sont aujourd’hui. Le passage de ces mécanismes archaïques à la géodynamique « moderne » s’est opéré aux alentours de 2.5 Ga, à la transition Archéen-protérozoïque, ce sont les modalités de cette transition que nous souhaitons investiguer. A cette période que se mettent en place de grands volumes de magmas appelés sanukitoïdes. Ceux-ci possèdent des caractéristiques pétrologiques et géochimiques intermédiaires entre celles des TTG archéennes et des séries d’arc modernes. Leur caractère transitionnel n’est donc pas seulement temporel mais aussi compositionnel. La ceinture de Limpopo, en Afrique du Sud présente la particularité de contenir de nombreuses intrusions mises en place assez régulièrement entre 2.9 et 2.2 Ga et dont la composition va de TTG pour les plus anciennes à sanukitoïdique pour les plus récentes. Des massifs mis en place à différentes périodes sont étudiés par une approche géochimique (majeurs, traces, isotopes) afin de reconstruire un modèle pétrogénétique fiable et réaliste et discuter les changements géodynamiques intervenus à cette période majeure de l’histoire de notre planète.