Que se passe-t-il dans un volcan ? La mission scientifique lancée début mai au Piton de La Fournaise pour cartographier en trois dimensions l’intérieur du massif permettra bientôt de le savoir.

C’est une mission scientifique de grande ampleur – « Scan 4 Volc » – qui s’est déroulée sur le massif du Piton de La Fournaise ces dernières semaines, avec pour objectif de cartographier l’intérieur du volcan, en trois dimensions. La Réunion, en étant le théâtre d’une opération de cette envergure, avec cette technologie, accueille ainsi une première mondiale. Grâce à des infiltrations d’électricité dans le massif du volcan, ces scientifiques veulent comprendre à quoi ressemble l’intérieur du volcan. Une première mondiale.

Prédire les futurs mouvements du massif du volcan

« C’est la première fois qu’on va imager en trois dimensions la structure électrique d’un volcan« , lance Anthony Finizola, professeur de volcanologie à l’Université de La Réunion (IPGP). L’idée : comprendre où passe l’eau, quelles sont les zones les plus perméables et donc fragiles… Car notre Piton de La Fournaise, est en mouvement, et on sait désormais qu’il glisse vers l’Est. Mais comment prédire les éventuels futurs glissements de terrain ou effondrements, voire les tsunamis ? C’est là tout l’enjeu de cette cartographie.

Le travail conjoint de professionnels, dont ceux de quatre universités

Pour obtenir cette imagerie détaillée, le projet « Scan 4 Volc », financé par l’Agence nationale de la Recherche, a réuni les efforts de pas moins de quatre universités – Université de La Réunion (LGSR et IPGP), Université Savoie-Mont Blanc, Université Clermont-Auvergne et Université de Salvador -, l’Observatoire de physique du globe (OPGC), l’Observatoire volcanologique du Piton de La Fournaise (OVPF), le Laboratoire Magma Volcan (LMV) et le bureau d’études Stratagem974.

Au total, c’est une équipe de 17 personnes qui s’est attelée à installer le lourd dispositif permettant de collecter les données.

Piton de La Fournaise

De l’électricité injectée dans le massif

Car cartographier un volcan en 3D n’est pas une mince affaire. Pour obtenir cette imagerie, l’équipe a utilisé une technique de pointe : des instruments modernes qui injectent de l’électricité dans le massif, jusqu’à 1km de profondeur, pour exploiter le principe de la résistivité. C’est la façon dont l’électricité passe dans le massif et résiste à la matière qui permet de comprendre la constitution de l’intérieur du volcan. Ainsi, c’est toute une campagne de « mesures électriques » qui a été menée depuis le début du mois de mai.

Comment ça marche ?

28 modules radio autonomes ont été dispersés sur le massif du volcan, pour recevoir le courant électrique et stocker les données, et plus de 35km de câbles pour relier ces électrodes, ont été déroulés sur les parties haute et basse. « Tous ces modules vont enregistrer les informations quand on va injecter le courant« , explique Lydie Gailler, physicienne adjointe Université Clermont Auvergne (LMV et OPGC), à l’initiative du projet avec Anthony Finizola.

Une mission très physique sur un terrain difficile d’accès

Il a fallu 17 jours aux 17 professionnels de l’équipe pour déployer ce lourd dispositif sur la zone, puis tout récupérer. Heureusement, ils ont pu compter sur de fins connaisseurs du Piton de La Fournaise comme Laurent Perrier, passionné du volcan et photographe, qui s’est délecté de cette mission.

« L’observation c’est une chose, la compréhension ça en est une autre, c’est génial« , s’enthousiasme-t-il, tout en reconnaissant que la tâche a été ardue. « On a déposé les modules et déployé les fils il y a 15 jours et là il faut remballer. C’est très physique parce la difficulté du terrain est épuisante« , résume Laurent Perrier.

Anthony FINIZOLA, Laurent PERRIER, Lydie GAILLER et Diego LOPEZ

Parmi ces professionnels, Diego Lopez, un étudiant en géophysique de l’Universitad de el Salvador, heureux de pouvoir en apprendre plus sur les volcans à l’autre bout du monde, mais aussi d’apprendre cette méthode pour pouvoir l’appliquer aux volcans du Salvador.

Une vidéo 3D attendue dans quelques mois

Leurs efforts seront récompensés dans quelques mois, quand l’analyse des données collectées sera achevée : à terme, elles devraient permettre d’obtenir un film en 3D du volcan. Une imagerie en 2D avait déjà été réalisée lors d’une précédente campagne en 2017.