J’ai le plaisir de vous inviter à ma soutenance de thèse, qui aura lieu le vendredi 27 février à 14h00 dans l’amphithéâtre 219 de la Maison des Sciences de l’Homme, 4 rue Ledru, et qui s’intitule :

« Capacité érosive des écoulements pyroclastiques : impacts sur les budgets éruptifs et implications pour l’aléa »

Apports de l’analyse texturale des dépôts et de la modélisation numérique des écoulements de l’éruption d’août 2006 du Tungurahua (Equateur)

Le jury sera composé de :

Guido Giordano Università Degli Studi, Roma Tre Rapporteur
Jean-Christophe Komorowski IPGP, Université Paris Diderot Rapporteur
Lucia Gurioli LMV, Université Blaise Pascal Examinatrice
Pierre Nehlig BRGM, Orléans Examinateur
Jean-Luc Le Pennec LMV, Université Blaise Pascal Directeur de thèse
Karim Kelfoun LMV, Université Blaise Pascal Directeur de thèse
Olivier Roche LMV, Université Blaise Pascal Invité

Les écoulements pyroclastiques (PF) sont des mélanges concentrés de gaz et de particules à haute température qui représentent l’aléa volcanique le plus meurtrier qui soit. La protection des populations nécessite la mise au point de cartes des menaces précises, qui requièrent une connaissance fine de ces phénomènes. Cependant, les causes et les conséquences de l’érosion/incorporation associée aux PFs au cours de leur mise en place restent encore largement méconnues. Cette thèse se propose de caractériser la capacité érosive des PFs, de définir des mécanismes d’érosion, et de quantifier leurs impacts sur les budgets éruptifs et sur l’aléa associé. Pour cela, cette étude se concentre sur les PFs de volumes modestes mis en place pendant l’éruption d’août 2006 du volcan Tungurahua (Equateur) et adopte une démarche double, basée sur des investigations sédimentologiques et texturales des dépôts, couplées à la modélisation numérique.
Une méthode originale, basée sur l’analyse d’images hautes résolutions corrigées par stéréologie, des études texturales détaillées des dépôts, et sur des bilans de matière en masse, permet de déterminer la granulométrie, la composition lithologique et la morphologie des produits sur l’ensemble de leur gamme de taille. Le calcul des bilans de matière montre que près de 50 wt. % des dépôts de PFs sont composés de matériaux non-juvéniles incorporés lors de la mise en place. Ces derniers proviennent principalement de la partie supérieure du volcan. La pente est ainsi le paramètre contrôlant au premier ordre l’intensité de l’érosion. Les budgets éruptifs complets appuient une classification en VEI 3 (0,09 km3) du paroxysme de 2006 du Tungurahua, et soulignent l’importance de considérer séparément les matériaux juvéniles et non-juvéniles pour estimer la taille d’une éruption. L’étude détaillée des constituants met en évidence une ségrégation dynamique des clastes par densité au cours du transport, avec un taux de sédimentation préférentiel de ≈10 cm.s-1. Les données lithologiques, granulométriques et morphologiques démontrent la présence de phénomènes de fragmentation/abrasion des clastes pendant leur transport. Les clastes massifs (ex : laves anciennes) sont le principal agent de fragmentation des clastes scoriacés (ex : bombes), ce qui a pour conséquence de produire en continu des populations granulométriques capables d’être transférées depuis l’écoulement dense principal vers les déferlantes et/ou le panache co-pyroclastique.
Les modèles numériques basés sur une nouvelle loi d’érosion développée dans cette étude démontrent la capacité de la rhéologie plastique à reproduire des PFs érosifs. L’érosion est associée à des variations dynamiques du rapport des contraintes normales/cisaillantes pendant la mise en place des écoulements dues à des fluctuations d’épaisseur lors de phases de décélération. Le front fin fortement frictionnel et érosif des PFs est poussé par une tête et un corps plus épais et non érosifs. L’incorporation s’accompagne de gains de distance de parcours de l’ordre de 10-30% en fonction du taux d’incorporation, qui dépend de la quantité de matière affouillable disponible sur le volcan avant l’éruption. Ces résultats montrent que l’érosion peut avoir un rôle majeur sur les zones impactées par les PFs, et soulignent l’importance de prendre en compte cette caractéristique lors de la définition de l’aléa, ainsi que pour les études futures.