Une des difficultés principales en sciences de la Terre est qu’on ne voit pas ce qui est sous nos pieds. Pourtant, imager le sous-sol participe à l’estimation des aléas volcaniques. Ainsi, localiser les variations de propriétés mécaniques permet d’anticiper des phénomènes tels que des glissements de flancs ou des effondrements de dômes. Ces phénomènes peuvent être associés à toute une cascade d’événements, comme des nuées ardentes, des coulées de boues (appelées lahars), ou des tsunamis, quand les volcans sont en domaine aquatique.

Notre connaissance des structures souterraines repose sur l’imagerie géophysique. A partir des mesures faites à la surface d’un objet géologique, des traitements numériques permettent de reconstituer sa structure interne. Néanmoins, ces images sont imprécises et peuvent être biaisées.  Pour pallier cet inconvénient, on combine différents types de mesures qui apportent un éclairage différent du même objet. C’est ce que deux laboratoires de l’Université Clermont Auvergne et du CNRS, le Laboratoire Magmas et Volcans et le Laboratoire de Physique de Clermont, ont testé sur le puy de Dôme. Dans le cadre du Laboratoire d’Excellence ClerVolc, les équipes ont acquis des mesures de gravimétrie et effectué des comptages de muons (muographie) afin d’obtenir des images complémentaires des densités des roches qui constituent le volcan. La gravimétrie mesure les variations de l’attraction gravitationnelle, qui dépendent des densités du sous-sol et donc de la répartition des masses en profondeur. et les muons sont des particules élémentaires générées dans l’atmosphère et dont la capacité à traverser un édifice dépend des densités des roches rencontrées.

 

Les mesures de gravimétrie (schématisées en rouge par des systèmes masses-ressorts : plus la gravité locale est importante plus le ressort est allongé) et les comptages de muons (schématisés par les lignes jaunes) sont combinés pour obtenir une image plus précise de l’intérieur des édifices volcaniques, tels que le puy de Dôme. Adapté de la photo de Cécile Savy, E.A.V.U.C.

 

Traiter ces données conjointement n’est pas chose aisée car l’image finale dépend toujours des traitements numériques appliqués. Dans un article à paraître dans Frontiers in Earth Science, une collaboration franco-canadienne a mis au point une méthode automatique fiable d’analyse conjointe des données de gravimétrie et de muographie. Cette méthode a permis d’imager le puy de Dôme, qui s’est révélé être l’archétype d’un dôme de lave : un cœur dense entouré d’une enveloppe moins dense liée aux éboulements qui ont accompagné sa mise en place. Les densités obtenues montrent que l’édifice est très poreux et perméable aux eaux de pluie.

En savoir plus

Robust Bayesian joint inversion of gravimetric and muographic data for the density imaging of the Puy de Dôme volcano (France), Frontiers in Earth Science

Anne Barnoud, Valérie Cayol, Peter G. Lelièvre, Angélie Portal, Philippe Labazuy, Pierre Boivin and Lydie Gailler

https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/feart.2020.575842/abstract